Je ne suis pas tout à fait sûr que cela soit directement lié à ma femme, mais le fait est que depuis que nous nous sommes mariés, de temps à autre, un nouvel enfant apparaît mystérieusement dans notre appartement. Au fil des ans, cette invasion discrète de petits êtres a pris des proportions considérables, si bien que même moi, avec mon esprit vif, je ne peux m'empêcher de les remarquer.
Et donc, avec Karel Čapek, je me pose une question fondamentale : « À quoi sert un nourrisson ? » Cependant, Čapek ne parvient à aucune réponse significative dans sa nouvelle Le cas de l'enfant, et comme j'ai trouvé la Bible à la bibliothèque, je cherche aussi là. Ce n'est pas une lecture désagréable, il suffit parfois de comprendre ce que l'auteur voulait dire : « Si vous ne devenez pas comme des enfants, vous n'entrerez certainement pas dans le royaume. » (Mt 18,3)
Puisque Dieu nous a donné à la maison tant de matériel d'étude, j'ai saisi l'occasion et commencé à étudier ces petits êtres. Nous avons suffisamment d'exemplaires pour l'expérimentation, des visages muets minuscules aux jeunes individus vigoureux. Qu'est-ce qui impressionne tant Dieu le Père dans ce stade de l'être humain, qu'il propose ces créatures immatures comme exemples à moi, un homme mature et au visage buriné par les tempêtes hivernales de Jablonec ?
Chaque âge d'enfant est digne d'être suivi, mais les plus petits parmi nos petits êtres domestiques sont en vérité les plus inspirants. Ils ne savent pas grand-chose, à peine marchent-ils à quatre pattes, mais ils cherchent inlassablement mon regard. Quand je le remarque et que je regarde attentivement les yeux les plus purs qui existent, je contemple à travers cette fenêtre infiniment belle directement le ciel. Le royaume céleste tant désiré. Dans le regard du petit être humain, il n'y a pas une parcelle de moi ! Il n'y a que la joie infinie que tu es là, papa ! Et à cet instant, même le père le plus rude ne peut s'empêcher de prendre ce petit dans ses bras, car sa joie d'être proche de son père est totalement désarmante. Et puis je me surprends souvent à chuchoter et à câliner cette petite créature comme un individu simple d'esprit, juste pour qu'elle me sourie à nouveau, afin que nous puissions revivre la joie d'être ensemble et de bien nous porter.
Le résultat de ma recherche est donc une découverte surprenante : le Père céleste semble désirer la même chose. Plusieurs fois par jour, il me prend aimablement dans son étreinte toute-puissante pour que je puisse sourire, détourner mon regard de mon moi et de tous mes malheurs et de mes tâches inachevées, cesser de me lamenter sur le poids du destin, et, avec les yeux de mon cœur, le regarder sans cesse avec joie, que nous sommes ensemble et que cela nous fait du bien.
Et parce que nous grandissons souvent avec nos enfants et perdons la vue de la direction du chemin vers le Royaume, le bon Père nous envoie à Noël dans les enclos de nos jours son Enfant. Un petit Enfant, dont le regard ne connaît aucun moi. Et pas seulement le regard, toute sa vie est dépourvue du moindre moi. Sa mort et surtout sa résurrection sont pour nous non seulement une fenêtre, mais une porte grande ouverte sur le royaume céleste.
Štěpán Pospíšil